TANT ET TEMPS D’AMOURS CONTRARIÉES

Publié par Vent d'Autan le

« De deux choses lune, l’autre c’est le soleil » Jacques Prévert

Aux préambules de l’aube, dans la flamboyance des cieux, chaque matin il ne cesse de scintiller de cette aura céleste qui enlumine le tourbillon de la vie. Le soir venu, dans l’ombre quasi impénétrable où s’estompent les lueurs du ciel, fébrile et attentionné il guette impatiemment cet instant précieux entre chien et loup où, à l’opposé de sa trajectoire elle apparait dans les mystères de la nuit, telle une fulgurance sans arrêt en équilibre. Et comme à l’accoutumée, il ne cesse de lui rendre grâce. Splendeurs et miséricordes du courtisan en mal d’amour.

Les yeux encore bordés de sommeil, il vient à peine de se réveiller quand déjà là voilà qui s’éclipse sans bruit, sans un mot, sans un regard, pour s’en aller s’assoupir dans les vagues sibyllines. Rendez-vous manqué. Complicité faussée. L’entente cordiale ne saurait être que piètre illusion. Fuis l’amour il te suit, suis l’amour il te fuit. Tout à la fois si proches et si distants l’un de l’autre, l’un sans l’autre. Blessure sans nom qui écorche les âmes dispersées aux amours disjointes.

Au cœur de cette imbroglio lequel des deux singe le rôle du mistigri et qui de ce duo infernal mystifie la souris ? Jeu de dupes, amer caprice des cieux. Va-t-il, au travers de ces abîmes, réussir à la rejoindre et ainsi lui déclarer sa flamme jusqu’à l’étreindre de son feu ardent ? Au fil des saisons volatilisées dans ces paysages inconnus, sa quête romanesque semble de plus en plus veine, vouée à la fatalité, inéluctable destinée. Ses plus belles ambitions semblent s’éteindre dans les vertiges de la sagesse. La raison risquant fort bien de l’emporter sur la passion de son cœur en pâmoison.

Plus il s’éloigne dans les profondeurs de l’horizon, plus elle se rapproche, et vice versa. Deux âmes labiles en proie à une certaine intimité au cœur même du vide. Deux ombres fiévreuses qui se frôlent, s’effleurent et se cajolent sans jamais se mêler, s’emmêler, s’entremêler. Autant d’oppositions que d’affrontements au sein ce perpétuel ballet dont les multiples défis dévoilent au grand jour leur empêchement mutuel.

Par quelques portes dérobées à nouveau il lui rend grâce, fidèle comme au premier jour du commencement des temps. Ô divine douceur, que l’aube novice embrase cette frêle aurore. Une parole tue, une lumière éclose par delà l’horizon, cette infinie présence avec son ombre pour seule compagne. Précaire équilibre comme pardon de leurs propres égarements.

Immuable la loi du cosmos guide sa course à travers la galaxie. Quoiqu’il puisse entreprendre, le grand architecte de l’Univers ne lui accorde que ces quelques instants fugaces passés en compagnie de sa muse d’infortune. Lui solaire, fils d’Éther reflet du jour qu’il ensemence de son feu sacré. Elle lunaire, fille de Nyx et des mystères de la nuit dont les infinis enchantements cisèlent sa graduelle inconstance entre ombre et lumière.

Suspendue dans les vastes pléiades célestes, au fil de ses cycles périodiques entre croissant, quart, et plénitude, elle ne cesse de changer d’apparence alternant visibilité et invisibilité. Du levant jusqu’au couchant, de quoi faire tourner la tête à l’Être éclairé, créateur d’extase et de raffinement. Juste un instant de grâce suspendu entre les nébuleuses. Deux éclipses à la croisée des chemins.

Le cœur à la peine et l’âme froissée, il passe le temps à écouter le murmure des jours anciens face au décompte d’interminables heures. En proie à cette fausse somnolence il fait mine de s’abandonner au vide retentissant de ces illusions perdues à l’orée du  gouffre de malentendus qui les séparent. Tout à proximité, ils ne peuvent se prétendre “nous” sans fabuler. Naïfs et candides les astres ne semblent point cohérents quant aux subtilités de l’amour. Turbulences poétiques.