LABEL BLEU

Publié par Vent d'Autan le

« La mer est ton miroir. Tu contemples ton âme dans le déroulement infini de la lame. » Charles Baudelaire

Solidement arrimés tout au long du front de mer, d’un bout à l’autre de l’horizon ce présomptueux alignement de mâts de métal hissant au firmament le pavois des nations. Oriflammes qui claquent au vent déployant à foison l’armada de bannières multicolores. Fiertés nationales déclinées en mode populaire. Touche de  curiosité bucolique aux ponctuations sonores de cette inlassable chorégraphie visuelle, comme pour mieux accrocher l’œil de néophytes en période de festivités estivale.

Bousculé par les folles ardeurs de l’Amélie,  le peloton de grappes ouatées file droit vers la Pointe de Grave, jouant des coudes jusqu’à  franchir la ligne d’étape vaporisée d’embruns. À peine quelques bribes azurées dans le ciel barbouillé de strates grisâtres. Caprice des temps en proie aux dépressions saisonnières. Rien de bien vraiment importun au regard des pas lents et feutrés posés sur le décorum de carte postale. Chacun des jours  ressemble à cette succession de galets échoués sur la plage. Bien que tous paraissent uniques, suivant le halo des lueurs  les uns et les autres se métamorphosent, saisissants d’émotion.

Éprise de liberté, l’èbe fougueuse se replie tout en douceur vers la lisière de l’inconnu, découvrant à perte de vue de vierges étendues le long du littoral. Instant privilégié en pleine métamorphose du recul du trait de côte. Mouvance du tumulte des eaux face au reste du monde. Nature morte au destin menacé dans les coulisses de l’été.

L’immensité demande qu’on y égare ses songes, ses pensées, ses humeurs. Qu’on y abandonne une part de soi même,  aussi infime soit-elle.  Quelque part, au bout de ce carrousel de vagues le moindre débris de rêve semble empli de gribouillis confus. Et par transparence autant d’histoires de vies en suspens au cordage de nuits sans étoiles, restées là bas dans l’ombre de l’abandon que les regards n’atteignent pas encore. Qui s’en souvient encore ?  Qui ne s’en soucie guère ? Qui s’en dédie parfois ? Qui d’autre sinon le caprice des  dunes en perpétuel mouvement de sables?