UN INSTANT D’ÉLOQUENCE

Tel un métronome Suisse,

Notre ami Pierrot, de main de maître,

Orchestre le tempo de chaque plan de scène.

Dans les profondeurs célestes de ses yeux clairs

Scintille une étincelle d’insouciance infinie.

Le maestro des tréteaux déploie ses ailes d’albatros.

Reclus derrière sa console de Titan

Bruno, alchimiste des feux d’artifices,

Distille à capella quelques brides éparses

De sa symphonie de lueurs nocturnes.

Sur fond de notes bleues, Ombres et lumières

S’enlacent et s’entrelacent entre aube et aurore

Dans un subtil ballet d’arabesques crépusculaires.

Tapi dans la pénombre du grenier des idoles,

L’œil vif et affûté,

Benoît, pétillant de malice,

Traque chaque instantané volage

Pour quelques clichés d’éternité.

Chefs d’œuvre de postérité graphique.

En coulisse, côté loges,

L’agitation balbutie à son comble.

Séance de maquillage appliquée

Et mini crêpage de chignon.

La tension palpable à souhait

Monte crescendo fortissimo.

La vague abonde sensuelle.

Côté cour, entre déballage et étalage,

Costumes bigarrés et accessoires variés,

Prennent des airs de capharnaüm

D’étrange vide grenier.

Occupez la place, qu’il disait!

Sur le grand planning des séquences

Chacun cherche sa marque et sa place

Tout en essayant de mémoriser chaque passage.

«  Surtout, ne pas se planter ! »

Le souffle court, le cœur qui accélère,

Les mains moites, les tempes qui bouillonnent.

Tout à coup, plus rien ne va!

Chacun déambule du mieux qu’il peut…

Les secondes interminables égrènent

Les tous derniers instants à venir,

Juste avant les trois coups, fatal.

Dans les starting-blocks,

La gorge nouée au fond des tripes,

L’angoisse du sprinter

En quête de médaille olympique.

Derniers soubresauts, les sens en émoi,

À fleur d’adrénaline, unis et réunis,

Le cercle se referme en corolle transie

Pour cette communion sacrée.

Trois chats plus loin,

Le sort en est conjuré!

Tous ensembles à portée de main,

Chacun prenant soin de l’autre.

On se porte, on se supporte, on se transporte.

La transe est à venir, juste au bout du chemin.

D’un sourire gracile et enjoué

Valérie accueille avec bienveillance

Les spectateurs d’un soir peu commun.

L’affiche, noir sur blanc, intimiste à souhait,

Promet de belles séances d’émotions à venir.

Derrière le rideau rouge écarlate,

Une place pour chacun, chacun à sa place.

Plus question de se défiler,

Ensemble jusqu’au bout.

Bref instant de grâce et d’éternité

Juste avant la délivrance.

Les premières notes déchirent

L’étrange silence de la nuit.

La face noire de la lune

Déroule sa complainte lancinante.

Le rideau dévoile au grand jour

Son panorama des grands espaces.

Soudain, par miracle ou par magie,

La scène s’éveille, elle prend Vie.

Se dévoiler pour enfin se révéler.

Nous avons encore au fond des yeux

Quelques milliers de poussières d’étoiles !