D’INNOMBRABLES HORIZONS

Que les poètes nous abandonnent de la sorte n’envisage guère de bons augures pour la suite des joies de ce monde.  Quel que soit le phrasé ou le style, la puissance vitale de toute création nous raconte des espaces imaginaires, langage unique et universel qui  sublime en nous cette étonnante cohésion d’une vision artistique au gré de folle virtuosité.

Emprunt de cet art de prédilection, Christian Bobin manie le verbe de façon si subtile que chacun de ses mots effleure la fragilité de nos âmes. Quelque chose en lui qui repousse au plus loin les limites pour toucher du doigt ces moments enchantés.  Désormais les mots n’auront plus la même saveur…

Il en est ainsi,

Chaque jour qui passe,

De ceux qui filent incognito

Sans jamais laisser d’adresse.

De ces silhouettes émaciées

Qui s’estompent en silence

A la lisière des coulisses.

Suscitant sensation de vertige,

Chacun ici dépose son fardeau

Au chevet des rendez-vous.

Des échardes au creux de l’âme

A la fois si présentes et si lointaines

Dans les méandres de ce fil rouge.

Aux inconnus qui traversent

Dans le grand détournement du réel.

Aux anonymes évanescents

Qui, sur la pointe des pieds

Se dérobent tant leur maestria

Revêt quelque chose d’ineffable.

Exaltés par leur filandreuse incandescence

Les poètes créent des histoires d’éternité

Instants sans fin, hors du temps.

Quelques poussières de filaments

Dans l’essaim des cieux.

Ne jamais désespérer à croire

Que quelconque paradis

Soit à jamais perdu…